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Économie

Edgar Mba Ognane : "Le champ de N’Gongui sera le premier gisement mis en production de la Ve République"

Le directeur général d’Assala Gabon, Edgar Mba Ognane, est très optimiste quant à la suite de l’aventure. © Jocelyn Abila

L’Union : Un an après le rachat des actifs d’Assala, comment se porte l’entreprise ?

Edgar Mba Ognane : Assala se porte bien, et même mieux qu’anticipé. La production quotidienne se situe désormais un peu au-dessus des 50 000 barils, ce qui représente près d’un quart du pétrole gabonais. Au dernier conseil d’administration, tenu deux semaines plus tôt, nous avons présenté nos statistiques de production qui se situent au-dessus du budget, malgré un déclin naturel des gisements de 15 à 20% par an.Cette performance tient au fait que nous avons accéléré la cadence des projets (forages supplémentaires, travaux d’intégrité, relance des installations critiques) an de "casser" la pente de déclin. Sur le plan financier, notre trésorerie demeure robuste ; nous n’avons plus recours aux emprunts adossés aux réserves ("reserve-based lending"), mais autofinançons nos opérations grâce aux taux de trésorerie générés par nos champs. Enn, le climat social est apaisé : des rencontres mensuelles avec les délégués du personnel, organisées dès notre arrivée, ont créé un dialogue constant qui associe nos équipes à chaque grande décision.

Le rachat a-t-il permis la sauvegarde ou la création de nouveaux emplois ?

Aucun poste n’a été supprimé et, parce que nous avons lancé davantage de forages et de travaux de surface, de nouveaux emplois ont été créés autour de nos opérations. Le départ volontaire de quelques cadres expatriés a été l’occasion de promouvoir en interne des femmes et des hommes déjà imprégnés de notre culture d’entreprise. Nous avons aussi procédé à des recrutements ciblés pour renforcer des compétences pointues. Au total, nos effectifs (environ 461 personnes) restent stables ou légèrement supérieurs à ceux d’avant la Transition, avec une vaste majorité de Gabonais dans toutes les strates de responsabilité.

Le Gabon entend recouvrer sa souveraineté dans le secteur pétrolier. En quoi ce rachat a-til constitué un grand coup ?

L’opération a transféré dans le giron de l’État plus de 50 000 barils par jour, soit près d’un quart de la production nationale. Jamais le Gabon n’avait contrôlé directement un volume de production pétrolière aussi significatif. Au-delà du symbole, cela signifie que les décisions d’investissement, de maintenance, d’exploration et, demain, de valorisation du gaz se prennent désormais chez nous, pour nous, et non plus dans un siège à l’étranger. Nous avons donc la capacité d’orienter notre politique industrielle dans le sens des priorités nationales : sécuriser la production existante, préparer l’avenir, notamment en gaz, et veiller à ce que la valeur générée bénéficie le plus possible à l’économie locale.

De nouveaux permis ont-ils été découverts par les nouveaux acquéreurs ?

Nous n’avons pas acquis de permis supplémentaires, mais nous avons conservé l’ensemble de nos licences et, surtout, relancé le portefeuille d’exploration. Trois blocs (Ozigo 2, Nziembou II et un permis satellite) font l’objet de travaux géologiques et géophysiques continus. Parallèlement, nous menons le développement du champ de N’Gongui : première huile visée en 2026, autour de 15 000 barils par jour. Ce sera le premier nouveau gisement mis en production depuis l’avènement de la Ve République. En outre, une équipe pluridisciplinaire travaille déjà sur les scénarios de valorisation de notre gaz, devenu un enjeu stratégique pour l’actionnaire et pour le pays.

Qu’en est-il de la situation à Londres ?

Le bureau de Londres reste un pilier de nos opérations, notamment pour l’orientation stratégique, la gouvernance d’entreprise et l’accès à l’expertise internationale. Il joue un rôle central dans la supervision de l’exploration, la conduite des études techniques pour nos projets d’investissement et l’accompagnement des instances de gouvernance et de planification à long terme. Londres nous donne aussi un accès direct aux talents mondiaux et aux marchés de capitaux, des ressources qui renforcent notre activité au Gabon, au lieu de s’y substituer. Et, surtout, c’est une plateforme d’échange de savoirs : nos collègues gabonais y effectuent régulièrement des missions, acquièrent des compétences de pointe, puis les mettent en œuvre localement. C’est ainsi que nous faisons en sorte que la valeur stratégique de Londres serve concrètement le Gabon.

Comment intégrez-vous les enjeux environnementaux dans votre stratégie industrielle ?

Nous avons fait du respect de l’environnement un pilier de notre ADN. Concrètement, nous avons signé une convention récente avec le ministère de l’Environnement pour collaborer étroitement sur trois axes : le renforcement des capacités de l’administration, la surveillance environnementale autour de nos opérations, et la création d’une brigade dédiée. Nous avons également adopté un plan ambitieux de réduction des gaz à eet de serre, avec en tête l’arrêt total du torchage opérationnel de routine d’ici à 2030. Cela s’accompagne d’investissements ciblés sur nos installations et d’un dialogue continu avec les autorités locales pour nous assurer d’un déploiement responsable. 

Quelle place accordez-vous à la formation des Gabonais au sein d’Assala ?

La formation est au cœur de notre stratégie de croissance. Nous sommes convaincus qu’il n’y a pas de performance durable sans compétence locale. C’est pourquoi nous soutenons systématiquement le développement des collaborateurs gabonais lorsqu’il existe un besoin. Au moment où l'État a pris le contrôle d’Assala, la direction générale était constituée essentiellement de collègues expatriés. Aujourd’hui, c’est l’inverse. Et sur les 461 employés, nous sommes bien au-dessus des standards de l'industrie avec une forte représentativité des Gabonais. Aujourd'hui, au Gabon, des postes à responsabilité sont occupés par les Gabonais et à d’autres postes où nous avons besoin d'être encore soutenus, nous avons des collègues expatriés. J’ai fait une grande partie de ma carrière à l'étranger et il est important que l'industrie pétrolière garde une ouverture vers l'extérieur, car c’est aussi une façon de s’améliorer. Cela va de pair avec la mise en avant des compétences de nos frères et sœurs gabonais.

Quel message voulez-vous adresser à ceux qui doutent de la capacité des Gabonais à diriger cette entreprise ?

Il y a eu beaucoup d'interrogations sur la capacité de la GOC à gérer ou à guider l’entreprise, il y a eu beaucoup d'interrogations sur la capacité des Gabonais à gérer au jour le jour cette entreprise. Mais une année après, l'entreprise se porte bien. Il était important de faire passer ce message un an après la nationalisation d’Assala, afin que les Gabonais sachent que nous travaillons. L'industrie pétrolière est un challenge permanent. Ce n'est pas facile. Mais aujourd'hui, Assala est au rendez-vous de ces dés et nous sommes résolument tournés vers l'avenir.

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