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Société & Culture

Plaine-Orety : comme un champ de ruines

Un sinistré de Plaine-Orety. © DR

Derrière les locaux de la télévision nationale Gabon 1ère, le temps semble suspendu. Ici, le décor évoque un champ de bataille. Tout n’est que ruines, décombres et désolation. On se croirait à un après-bombardement intensif.

Là, un rapport de stage froissé. Ici, une valise éventrée. Plus loin, un veston abandonné. Des barres de fer entremêlées jonchent pêle-mêle les lieux, mêlées à des tôles froissées et des pans de murs effondrés. Par endroits, des tuyaux dénudés émergent des gravats, témoins de la brutalité soudaine de l'action.

En fouillant les restes comme pour identifier quelques ex-propriétaires, les équipes de L’Union tombent sur une attestation de fin d’études, prise au piège entre un morceau de bois et une brique. "Le commissaire du gouvernement, directeur national des assurances, certifie que M. Elle Ngomo Jeff a régulièrement suivi, pendant les années scolaires 1995-1997, les cours au Centre national des assurances pour la préparation au diplôme d’agent technique d’assurances…" Un fragment de vie abandonné dans la précipitation. Comme ces bottes de pluie oubliées, ce grillage qui servait peut-être aux barbecues, ou encore ce canapé éventré par la pelleteuse. Derrière Gabon Télévisions, il ne reste que des morceaux d’histoires. Des tranches de vie. Des souvenirs d’hommes, de femmes et d’enfants qui ont vu le jour, grandi ici, et n’ont jamais connu ailleurs.

Puis, ce lundi 2 juin, alors qu'on ne les attendait pas, les engins sont arrivés sur les lieux. Et avec eux, la fin brutale d’une vie. Dans la panique, chacun a fait comme il a pu. Un véritable sauve-qui-peut. Passées la surprise et l'émotion, que sont devenus aujourd’hui les "sinistrés" ?

Fortuné Mba, rencontré sur les lieux mêmes de son enfance, s’est réfugié à Mindoube avec sa famille. Dans l’urgence, c’était l’unique option. Marcel Evouna, dont la vie entière s’est écroulée sous les coups des bulldozers, est hébergé chez sa belle-famille, en attendant de voir clair. Christine Ndong, quant à elle, a trouvé refuge chez sa fille, de l’autre côté de Plaine-Orety. Mais elle reste sur le qui-vive. Il se murmure que ce secteur aussi pourrait bientôt être rasé. Comme beaucoup, elle ne sait jusqu’où iront les démolitions, ni quels quartiers seront épargnés.

Au milieu de la poussière, un autre visage de cette crise émerge. Celui du recyclage… de survie. Parmi les gravats, Natou, 10 ans, Yvan, 8 ans, Mélissa, 11 ans. De tout petits recycleurs. Ils ramassent des morceaux de carreaux, pendant que d’autres – plus âgés – collectent des rebuts de métal.

La vie continue d’une certaine manière. Mais une question plane, comme un nuage de cendres au-dessus des ruines : et maintenant ?

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