L'année scolaire 2024-2025 a pris officiellement fin samedi écoulé avec la publication des résultats du second tour du baccalauréat. Pendant que les regards des nouveaux bacheliers sont tournés vers la suite de leur parcours académique, un communiqué de l’Agence nationale des bourses du Gabon (ANBG), lu par sa directrice générale, Paule Élisabeth Désirée Mboumba Lassy, a précisé les contours du nouveau régime d’attribution des bourses à l’étranger.
Intervenant après les propos tenus deux semaines auparavant par le président de la République, Brice Clotaire Oligui Nguema, en marge du Sommet États-Unis- Afrique, cette communication apporte un bel éclairage quant à la vision du numéro un gabonais de l'octroi des bourses. En écoutant bien la directrice générale de l'ANBG, il est clair que les propos relayés à tort ou à raison par l'opinion, reposent simplement sur le souci d'application du contenu du décret 065/PR/MES/RSIT du 12 février 2024. Lequel précise que seules les filières dites prioritaires pour le développement national doivent bénéficier de bourses pour l’étranger. Notamment pour les pays comme la France, le Canada et les États-Unis où les coûts des études sont très élevés. Voire excessifs.
Lesdites filières concernent la transformation des matières premières, l'agronomie, le numérique et le digital, l'aéronautique et les spécialités médicales. Or jusqu'à présent, les choix de ces destinations n'ont plus jamais tenu compte de ce texte ou de ces critères. Occasionnant ainsi, au fil des décennies, d'énormes dépenses à l'État quant à la formation de ses nombreux étudiants dans les pays du Nord cités plus haut. Le décret précise également que les bourses à l’étranger seront désormais orientées, mais en priorité, vers des pays ayant des "coûts soutenables". Le cas du Maroc (5,5 millions de francs l'année), le Sénégal (3,1 millions de francs), le Ghana, etc.
Une bonne décision somme toute. Pourtant, si cette logique d’économies budgétaires peut se comprendre, elle ne soulève pas moins la question de la qualité et de la diversité de l’offre de formations dans ces pays africains. En effet, peut-on vraiment imposer à un étudiant passionné de robotique ou de nanotechnologie, de se contenter d'une formation disponible uniquement dans une université du Sénégal ou du Maroc, parce que le coût y est moindre ?
Ce resserrement des bourses à l’international peut être compris si, en parallèle, le pays avait investi dans la mise en place d’établissements nationaux aux standards internationaux, dotés des spécialisations du monde actuel et du futur. Or, l’écart entre les ambitions affichées et la réalité est criant. Les établissements d’enseignement supérieur gabonais, malgré quelques efforts fournis, ne parviennent pas à absorber ni la demande ni à proposer des filières pointues ou innovantes, dans des conditions optimales.
De nombreux étudiants qui aspirent à une formation de qualité n’ont souvent pas d’autre choix que de se tourner vers l’étranger. Cette situation met en lumière l’échec récurrent des politiques d’orientation et d’adéquation formation-emploi. Malgré les multiples salons de l’orientation organisés chaque année, leurs recommandations restent lettre morte.
Pour certains observateurs, limiter les départs vers l’étranger sans avoir sérieusement organisé l’environnement académique local, revient à mettre la charrue avant les boeufs. En ceci qu'il faut d'abord panser les vrais maux que sont le manque d’infrastructures modernes, l'obsolescence de certains contenus pédagogiques, l'insuffisance de partenariats internationaux durables.
Le discours officiel rassure les étudiants déjà en formation à l’étranger, mais qu’en est-il des prochaines générations ? Devant une offre locale encore limitée et une orientation souvent imprécise, ce sont des ambitions de milliers de jeunes qui vont se heurter au mur froid des restrictions budgétaires.
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