Éducation : ces nombreux freins à la scolarisation des jeunes

Éducation : ces nombreux freins à la scolarisation des jeunes

GROSSESSES précoces d’un côté, manque de moyens de l'autre, absence de fauteuils roulants pour certains, non-déclaration à la naissance pour d'autres, etc. Les raisons du décrochage scolaire ou de l'abandon pur et simple sont nombreuses. Mais, comment en arrive-t-on là dans un Gabon qui clame l'école obligatoire pour les enfants de 3 à 16 ans ?

 

LE centre social d’Akébé est bien calme ce jeudi matin. Normal, les enfants ne courent pas partout comme à leur habitude. Ils sont à l’école. Sauf les bébés et l’un d’entre eux, Horlain Moubouli, 9 ans. Il est petit. Mais ce qu'on remarque très vite, c'est cette bosse sur son dos. Serait-elle la raison de sa non-scolarisation ? "Non", répond le gamin lui-même. L’histoire est tout autre. Horlain habite avec son oncle vivant avec un handicap au Centre social d’Akébé depuis la mort de ses parents. Il n'a pas d'acte de naissance. L'oncle, Victor Mouketou, n'a pas pu l'inscrire à l'école publique du coin faute de ce précieux document. Et puis, peinant déjà à les nourrir, ayant des difficultés de locomotion, il fait le choix de la survie. Pourtant Horlain, comme les enfants de son âge, a des rêves. "Je veux être homme d'affaires pour gagner beaucoup d'argent, rouler dans de belles voitures et aider les autres." Hélas pour le bout d'homme, il ne peut aller à l'école pour acquérir d'abord quelques rudiments de connaissance. Le pire c'est que souvent, quand les autres y vont et le laissent tout seul au centre, il devient malheureux.

 

Horlain n'est pas seul dans cette situation. À Nzeng-Ayong au lieu-dit Barack Obama, vit une fillette. Elle est vivace, elle est jolie aussi. Mais Michelle Okawe, 8 ans, est surtout née avec un handicap découvert à l'âge de 1 an : elle marche sur ses poignets. D'ailleurs le jour de notre passage, elle souffrait atrocement de s'être portée ainsi sur plusieurs jours. À la question : pourquoi tu ne vas pas à l'école, elle répond sans hésiter : "Parce que je ne marche pas." En fait Michelle, du moins ses parents, ont bien tenté de l'inscrire à l'école, mais faute de fauteuil roulant, ils ont dû abandonner. "Les maîtresses n’étaient pas disposées à faire la nounou pour la porter aux toilettes et autres", relate son géniteur. Voilà comment la petite est condamnée à rester à la maison. Pourtant un échange avec elle dévoile une intelligence à l'état latent. Son père raconte qu'elle est peinée quand elle voit les autres enfants aller à l'école. "Elle pleure même. Mais que faire, je n'ai pas les moyens." Si Horlain et Michelle ont des histoires de fauteuil roulant et de manque d'état civil comme motifs de non-admission à l'école, d'autres raisons poussent également à l'abandon scolaire.

 

Lilia Ginette Aganga, 18 ans, habitant au quartier Plaine-Orèty de Libreville, a abandonné l’école en classe de 5e parce qu'exclue pour notes insuffisantes. Faute de moyens pour aller dans le privé et d'un bulletin ''respectable'' pour tenter ailleurs au public, elle a été obligée d'abandonner. Un an après, elle fait un bébé et perd tout espoir de retourner sur les bancs de l'école. Désormais mère de deux bambins, elle n'y pense plus. "J'aurais pourtant aimé poursuivre mes études, je pensais même y retourner un jour. J'ai perdu tout espoir lorsque je me suis retrouvée de nouveau enceinte". Définitivement hors du circuit scolaire, sans aucun diplôme, elle espère intégrer une école d’esthétique pour rattraper le cours de la vie.

 

Autre cas d'interruption de la scolarité, celui des enfants d'Elvire L. Elle habite Franceville, dans la province du Haut-Ogooué. Elle a 45 ans et mère de 6 enfants dont 3 vont à l'école, les plus grands, et 3 autres sont assis à la maison. Son histoire est un peu comme celles de nombreuses mères de famille abandonnées par leur conjoint et qui, faute de moyens, sont obligées de sacrifier l'éducation de certains enfants. Son revenu n'étant pas suffisant, elle a décidé de privilégier les 3 aînés déjà au collège. Ceux du primaire pouvant encore attendre. Pourtant, elle a tenu jusqu'à l'année dernière. "J'ai dû me rendre à l'évidence : mon petit salaire de 80 000 n'est pas assez consistant. Alors contre mon gré, je fais des choix difficiles."

 

Line R. ALOMO

Libreville/Gabon

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